On a vécu la période dorée du voyage. Accessible, abordable. Le lointain était devenu proche. On ne connaissait pas notre chance. Tout était à notre portée. Partir n’était plus vraiment un luxe réservé à une élite. Je sentais notre époque privilégiée. On avait un choix de vies, de carrières illimitées. Cela nous semblait incroyable que nos grands parents n’aient pas vu la mer durant l’enfance. J’avais l’impression qu’ils vivaient dans un monde très étriqué et restreint. Comme s’ ils ne pouvaient  pas voir ou savoir. La même vie pour toujours, le même petit village, les mêmes personnes. ça leur suffisait car ils avaient connu la peur, la faim, la privation de liberté. Alors ce petit monde c’était déjà beaucoup.

Un passeport estampillé Union Européenne ça valait de l’or il n’y a pas si longtemps. On n’ a jamais conscientisé cette chance. La liberté de mouvement est un luxe réservé à une partie de l’Humanité privilégiée. L’on vient d’avoir un léger aperçu de  la frustration d’un être humain consigné dans son propre pays.  L’on n’est pas tous souhaité dans un pays. On ne connaissait pas cette sensation d’être un pestiféré. Les rêves s’arrêtent aux frontières.

Nous, on est Français, des conquérants depuis Saint Louis. On s’est toujours senti spécial dans le monde. Comme si le monde entier nous admirait. Puis le 16 mars on s’est rendu compte qu’on était un petit pays incapable de gérer une crise sanitaire. Des pays que nous regardions de haut on su  faire mieux avec moins.

Nous, nous avons toujours reçu  plus, alors forcément rien n’était jamais trop beau, trop grand. La liberté on ne la réfléchie même pas. On était des enfants gâtés pourris. Insatiables, ils nous en faut  beaucoup pour être heureux et comblés. On mène des quêtes spirituelles, des défis physiques. On a des névroses, des obsessions matérielles. J’ai pas l’impression que l’on a été une génération bénie, bien au contraire. On a hérité d’un monde pas terrible et d’un pays en déclin. On a une illusion de paix.

J’aime beaucoup cette pensée : L’être humain est le virus de la terre est le covid 19 son vaccin.

Je repense à cette chance de voyager. Ces possibles sans limites. Peu d’obstacles, peu de chaînes. Puis tout d’un coup plus rien. Ça va devenir très compliqué d’être inspiré par le voyage, de développer un imaginaire autour de quelque chose désormais inaccessible. Les déplacements ont  largement contribués à propager ce virus et salir sans le vouloir ce monde. La mondialisation, les déplacements de masse, les délocalisations ont amplifiés la gravité de ce virus. Bien qu’ayant conscience de nos actes, l’on conserve cette envie un peu égoïste de bouger car c’est comme ça l’on reste au fond cette espèce nomade un peu folle. Nous sommes en ce moment en semi liberté. On doit compter sur l’autre pour se protéger.

 

On a été condamné comme dans ce film avec Bill Murray à revivre éternellement la même journée. Une mécanique trop froide, répétitive, huilée comme une machine  sans failles. On peut  l’avouer on a tous rêvé un jour de ne rien faire.  Ne plus culpabiliser de cette  pression sociale d’être dans l’activisme, d’avoir toujours quelque chose à faire, quelqu’un à voir. Non pas que ce soit intéressant mais ça donne une contenance, un semblant de vie remplie. Trop de temps tue le temps. Dans nos vies d’avant tout allait trop vite. On courrait après le temps comme le lapin blanc dans Alice au pays des merveilles. (je sais j’ai de solides références culturelles). On ne voyait pas les enfants grandir, jamais le temps de fixer cette étagère… Il faut juste changer notre histoire du temps, notre conception de la lenteur. On nous l’a martelé nous sommes en guerre, je crois qu’Anne frank ou Hans et Sophie Scholl nous détesterait de dire ça. On est en arrêt, en attente. Une longue léthargie d’état. Aujourd’hui on est un peu des Jim Carrey dans the Truman show. On profite d’une liberté avec périmètre. Une liberté conditionnelle et suspendue à la bonne volonté d’autrui de se protéger.

Sera t’on capable de supporter la foule des rues, le bruit les terrasses bondées. L’enfer c’est les autres, faudrait pas l’oublier… La vie d’avant c’était tellement bien et on ne le savait même pas. On vivra sous une cloche aseptisée pendant quelques mois peut être.

Les périodes confinement /déconfinement vont devenir un mode de vie, une alternance de vie. L’on appréciera tout avec l’émerveillement de ceux qui ont été privé, de ceux qui savent que c’est un privilège de voir le monde. Faut le redire on était un peu gâté pourri. C’était presque devenu trop facile de voyager, trop automatique. Mais cette petite adrénaline du départ pour une contrée inconnue manque.

La problématique principale est de savoir ce qui est bien pour soi et bien pour le monde. Voyager sera  plus égoïste? Un acte de solitaire inconscient d’être un vecteur de propagation de la maladie ?

 

 

 

 

 

 

17 Comments

  1. Tout n’était pas rose dans le monde d’avant, les guerres mondiales, la colonisation… Je pense que nous nous adapterons à cette nouvelle manière de bouger, le trafic aérien ne retrouvera pas avant 2023 , le niveau d’avant la crise… Nous bougerons autrement…

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  2. Je crois que tu as raison concernant le voyageur, la liberté et même la façon de regarder autrui…Tout cela va changer même si certains tenteront d’en faire abstraction parce qu’ils étaient bien dans le mode de vie d’avant…mais les rapports vont changer…parce que le voyageur va changer de vision mais l’hôte aussi va changer son regard. Et que va t’il rester des commerces, hôtels et autres…dans les pays que le terrorisme avait déjà impacté ?…Tu es sans doute bien placée pour donner ton avis éclairé sur la question.

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  3. Belle réflexion…qu on a tous eu le « temps  » de faire ces dernières semaines…comment va t on mettre à profit et transformer tout ça en choses et en actes positifs ? Les choses je l espère vont changer, un peu, chacun de notre côté…tout simplement voyager moins mais voyager mieux, plus attentifs et conscients des conséquences de nos actes aussi anodins soient ils !

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  4. Tu as fais une belle analyse…mais sans doute pour le moment voyagerons-nous moins, mais nous apprendrons à mieux connaître notre pays, ses habitants et à admirer ses forêts. Nous le verrons avec d’autres yeux. Je me dis tous les matins que la chance d’être en vie est merveilleuse et je m’émerveille d’un rien.
    Il y a déjà eu de grands changements dans notre histoire et nous finissons par nos habituer… et peut-être étions-nous dans notre bulle loin des guerres et des conflits mondiaux.
    Prenons soin de nous.
    Belle fin de semaine Affranchie et bises audoises
    chatou

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  5. l’être humain a fait beaucoup de mal à la planète, à cause de la cupidité et la cruauté et l’irrespect de certains, c’est possiblement bientôt la fin de l’humanité … j’ai vu au JT de France 2 la carte du monde avec en rouge les endroits où la pandémie est hors de contrôle, presque toute la Terre est en rouge à part l’Europe !!! …

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    1. Je sais pas… Non ce n’est pas la fin de l’humanité. Il y’a des épidémies depuis le début de l’histoire humaine. Même si il y’a eut des hécatombes, l’humanité a toujours survécu à tout. Ce sera une épidemie parmis tant d’autres je pense

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